vendredi 2 décembre 2011

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Résumé des doctrines des principales écoles philosophiques grecques

Epicurisme, Stoïcisme, Scepticisme, Cynisme
     Ces quatre écoles ont été inspirées par Socrate, et se sont développées  essentiellement à Athènes vers le 4ème siècle av J. C. En tant qu’écoles, elles ont disparu  mais en tant que doctrines elles subsistent. Leurs œuvres nous sont connues essentiellement grâce à des Manuels et à des questions-réponses d’autres philosophes. Un Manuel était destiné aux étudiants et contenait la doctrine.

Epicurisme : Fondé par Epicure. Il s’est installé dans un lieu qui s’intitulait « le Jardin ». Son cours était ouvert à toutes et à tous.
Tout de suite, Epicure a été attaqué et on a inventé le préjugé de l’épicurien se livrant de manière effrénée à la jouissance  de toutes sortes de plaisirs.
La Nature étant le seul guide,  il nous faut adopter une hygiène de vie qui repose sur l’équilibre naturel (c’est le contraire de la caricature).
Nous devons  rechercher le bonheur par la renonciation préventive à ce qui nous fait souffrir
Chacun doit apprendre à  se contenter ( c’est-à-dire : se rendre content).
Il importe de vivre au présent, non dans les regrets ni dans l’attente de l’avenir.
Il ne faut pas craindre la mort ni l’avenir : « Quand je suis, la mort n’est pas ; quand la mort est, je ne suis pas. ».
Enfin, il convient de refuser de croire aux Dieux ou à une quelconque finalité : rien n’est prémédité.
Conclusion : Toute quête nous entraîne au-delà de ce qui est en nous naturel et nous écarte ainsi du bonheur puisqu’elle est sans fin. Philosopher cependant est une activité (c’est la seule) qui rassure les hommes en dissipant leurs ténèbres et qui permet d’atteindre cette tranquillité de l’âme (ataraxie, absence de troubles) qui est la condition du bonheur.

Stoïcisme : Du mot grec « stoa » qui signifie  « portique » : c’est à cet endroit d’Athènes que se réunissaient les Stoïciens.
Vivre conformément à la nature en conformant ses désirs à l’ordre rationnel de l’univers. Par là ils reprenaient la vieille équation grecque : « l’harmonie est à l’univers ce que la justice doit être à la cité » : Harmonie / Univers = Justice/Cité.
Première phrase du Manuel d’Epictète : « Il faut distinguer ce qui dépend de nous de ce qui ne dépend pas de nous ».
Une autre Maxime de Sénèque : « Ne pas chercher à lutter contre ce qui nous arrive mais l’accueillir et ainsi trouver la tranquillité de l’âme, condition d’accès au bonheur « 
Descartes, dans Le Discours  de la méthode se donne : « une morale par provision ». Il s’inspire des Stoïciens pour écrire : « Changer mes désirs plutôt que l’ordre du monde. »
Être courageusement en cohérence avec soi même, d’après Sénèque : « Toujours vouloir la même chose, toujours refuser la même chose. »
Cette philosophie de la rigueur a elle aussi été caricaturée. On doit à Alfred de Vigny l’invention de l’attitude stoïque qui a peu à voir avec le Stoïcisme : être ferme, courageux et résolu face à l’adversité.

Scepticisme : Autrement appelé « le Pyrrhonisme » du nom de son fondateur, Pyrrhon.
 Le scepticisme (du grec skeptikos, « qui examine ») est, au sens strict, une doctrine selon laquelle la pensée humaine ne peut se déterminer sur la possibilité de la découverte d'une vérité. Il ne s'agit pas de rejeter la recherche ; son principal objectif n'est pas de nous faire éviter l'erreur, mais de nous faire parvenir à la quiétude (ataraxia), loin des conflits de dogmes et de la douleur que l'on peut ressentir lorsqu'on découvre de l'incohérence dans ses certitudes.
Il s’agit donc de refuser tous les dogmes, toutes les croyances établies (philosophiques ou religieuses) ou les mettre en doute. (Montaigne avait comme devise : «Que sais-je ? »).
S’accepter soi même et accepter le monde tel qu’il est, sans en attendre rien de pire ni en espérer rien de meilleur.
Prendre la vie comme elle vient en se laissant aller à son mouvement naturel.
Agir arbitrairement en écoutant que soi et ne pas chercher à justifier ses actes.
S’abstenir de tout et ne porter aucun jugement de valeur.
Être indifférent aux choses du monde.
 « Le scepticisme est la faculté de mettre face à face les choses qui apparaissent aussi bien que celles qui sont pensées, de quelque manière que ce soit, capacité par laquelle, du fait de la force égale qu'il y a dans les objets et les raisonnements opposés, nous arriverons d'abord à la suspension de l'assentiment, et après cela à la tranquillité», Sextus Empiricus,Esquisses pyrrhoniennes, I, 8 »

Cynisme : Diogène :  Ne reconnaître aucune autorité ; récuser dieux et maîtres, et les lois parce que ce ne sont que des inventions.
Vivre à contre courant des modes, des dogmes et même de la politesse.
S’efforcer à vivre en autarcie ou du moins refuser toute dépendance.
Désirer la maîtrise de son existence et de ses forces ; croire que se construire soi même est possible.
Le modèle du cynisme est l'animal. La société est perçue comme corruptrice et changeante, là où la nature est vertueuse et universelle. Diogène de Sinope se revendique ainsi cosmopolitain, c'est-à-dire citoyen du monde. Son souci est de vivre selon des règles de vertu universelles.
Les armes du cynique sont la transgression, l'ironie. En transgressant tous les interdits, le cynique veut démontrer qu'aucune des règles sociales n'est essentielle, et que seule compte l'éthique naturelle, universelle : la vertu.
L'école cynique prône donc la vertu et la sagesse, qualités qu'on ne peut atteindre que par la liberté. Cette liberté est une étape nécessaire à un état vertueux et se veut radicale face aux conventions communément admises, dans un souci constant de se rapprocher de la Nature.

Le Devoir   


Que dois-je faire ? Selon Emmanuel Kant c’est l’une des trois questions essentielles de la philosophie – les deux autres étant : Que puis-je savoir ? Que puis-je espérer ?
Cette question prend pour objet nos propres actions. Or l’idée même de devoir implique une certaine liberté. Dans le monde animal, il y a nécessité : pas de liberté donc pas de devoir. Non soumis à la seule nécessité, nous avons le pouvoir de décider ce qui doit être à la place de ce qui est.  La question est de savoir comment nous devenons conscients de nos devoirs et ensuite quelle volonté devons-nous avoir pour être à la hauteur de nos exigences ?


Dès l’enfance nous apprenons à  obéir en étant obéissants. Ce sont des obligations. Les enfants ne savent pas décider ce qui est bien. (Enfant = (latin) infans = qui ne parle pas). De manière innée, les enfants ne savent pas les valeurs communes.

Obéir vient du fait que nous sommes dès le départ à la fois imparfaits et incomplets.
Peu à peu, nous découvrant imparfaits nous voulons nous approcher d’un idéal, d’un meilleur. Je ne peux pas me contenter de mes imperfections, de mes manques, de mes lacunes et de mes vices. Il me faut m’améliorer. Donc, je me donne comme à mon enfant, des devoirs pour échapper le plus possible à une réalité imparfaite. On obéit parce qu’on sait qu’au bout du compte il y a un mieux à gagner. Ce mieux peut consister dans le partage des valeurs comme dans le développement de mes talents et de mes vertus.  
Nous obéissons parce que nous sommes incomplets en étant seul : nous ne pouvons pas, alors que nous sommes des enfants, nous donner à nous-mêmes nos propres valeurs, nous devons les emprunter. Nous devons les partager et c’est au prix de ce devoir que nous existons ensemble.
Notre liberté commence par l’obéissance parce qu’elle est un chemin vers la conscience et vers l’autonomie du jugement.

Devoir (grec) = Déon à déontologie

La morale est un idéal : on accepte en pensée qu’on a des devoirs mais dans la pratique on ne le réalise pas toujours. Nous ne sommes pas profondément concernés par la validité de nos devoirs. On n’obéit qu’à une autorité supérieure avant de la faire sienne. Afin que j’obéisse au bien quand je suis seul. 
Jean-Jacques Rousseau : « S’il faut obéir par la force, on n’a pas besoin d’obéir par devoir, et si on l’on n’est plus forcé d’obéir on n’y est plus obligé ». Du contrat social

Il est donc légitime de désobéir à un pouvoir illégitime. Jean Moulin a désobéi par devoir. Le parangon de la désobéissance légitime est Antigone.

A Nuremberg, a été inventé le concept de « crime contre l’humanité » : Je ne peux pas tuer, même en obéissant à des ordres supérieurs, des individus sous prétexte qu’ils sont vivants ou qu’ils appartiennent à une communauté particulière.
Montrer que de fait les hommes n’accomplissent jamais tous leurs devoirs n’est pas une objection contre le devoir, cela confirme seulement que la morale est un idéal et non pas une réalité.
On a dit qu’on n’obéissait pas toujours à nos devoirs, même à ceux qu’on se donne.
L’expérience de Stanley Milgram (cf. le film I… comme Icare) est tout à fait éclairante sur l’obéissance aveugle.
On constate que le penchant de l’obéissance va vers le mal.
"Video meliora proboque deteriora sequor".
Ovide, Les Métamorphoses 7:20 -paroles prêtées à Médée : "Je vois le bien, l'aime, et je fais le mal." 
Obéir au mal, c’est par le biais de l’autorité appartenir, être reconnu, donner un sens collectif à sa vie. Obéir à des valeurs, c’est se déterminer seul et en conscience.


On apprend à obéir par obligation et pour se parfaire et se compléter. Mais la morale étant un idéal, celui du bien, obéir ne peut pas être une fin en soi. On doit donc légitimement désobéir à ce qui est injuste ou mal.



La Technique, l’Art et le Beau.  


Jusqu’au 18ème siècle, art et technique étaient synonymes en tant qu’ils manifestaient  un même pouvoir de création, celui d’un monde artificiel dû à l’esprit et à la main de l’homme.

Art  en grec = technê (latin = ars)

Puis à la Révolution française, les deux termes se sont spécialisés ; la technique a d’abord désigné des procédés matériels qui interviennent dans un art, puis l’ensemble des procédés d’action et de fabrication. Tandis que l’art désignait la production d’œuvres (opus – (pluriel = opera))  pour leurs formes, ainsi que l’activité désintéressée par excellence consacré à un idéal : le beau.

Procédé : en latin = procedere = avancer
Forme parfaite = idée (à Platon)

Beau à Grec ancien : kala
         à Grec moderne : morphia, ce qui veut dire : forme
Laid à Amorphia : qui n’a pas de forme


Cela posé, leurs définitions sont fluctuantes historiquement et nous invitent à nous demander : en quoi l’art est-il une activité différente des autres techniques ? Le beau et l’utile s’opposent-ils  nécessairement ? La technique a-t-elle aujourd’hui tué l’art ?





L’artiste doit tenir compte du matériau avec lequel il travaille et des moyens et outils qu’il a à sa disposition. D’ailleurs, l’activité artistique change de degré et non pas de nature en fonction des outils et des matériaux à disposition. Léonard de Vinci liait production et création.
La production suppose l’application méthodique d’une technique. (Produire= process = procédure). La création renvoie à un pouvoir divin. La création se fait à partir de rien, à partir du néant (cf. Genèse).
Il reste de ce pouvoir divin l’idée d’inspiration. Socrate disait qu’il était inspiré par son « daîmon » et reconnaissait que les poètes étaient « les interprètes des dieux » et donc leur déniait tout savoir faire propre (cf. Ion).

Daîmon = génie familier, voix divine, pour Socrate.

L’art est lié au surnaturel : il n’est pas simplement une technique, il est cette technique plus de l’inconnu, du spirituel…

Archeiropoïeta : non fait par la main de l’homme.

L’art chrétien au départ ne devait pas exister puisque le christianisme prolongeait l’interdiction juive de la représentation. Cependant de glyphes en images (en grec : icône), la production fut abondante jusqu’aux crises iconoclastes (entre 6ème et 8ème siècle). La réponse des Pères de l’Eglise a été d’autoriser la production d’images « non faites de mains d’hommes ».
Le Saint Suaire de Turin, le voile du Christ de Véronique (= image du vrai, vraie image).
Comme le Christ est « Dieu invisible rendu visible », alors je peux produire des images de ce qui est invisible. « Per invisibilia visibilia »

Emil Cioran – Syllogismes de l’amertume
«  Il y a quelqu’un qui doit tout à Bach. C’est Dieu »
Il y aurait donc une différence radicale entre l’art et la technique. Cette dernière a pour règle définitive, l’efficacité. Tous les moyens sont bons d’agir sur la réalité à partir du moment où ils agissent efficacement. Elle réduit toute chose à l’usage qu’on peut en avoir ( Principe que Marcel Duchamp  subvertit – Fountain – 1917).
La technique est utilitariste et instrumentaliste. Selon Heidegger, le monde est devenu technique et science qui ne pense pas. Au départ, la technique, comme le rappelle Platon dans le Protagoras, est un don de Prométhée pour aider les hommes à vivre dans une nature qui leur est hostile, pour produire de l’art et pour améliorer leurs conditions d’existence. Elle est donc utile à l’homme. C’est son développement moderne qui fait peur. L’art est à l’opposé de cette conception : il agit sur notre sensibilité et oriente vers un idéal désintéressé, le beau et ajoute une dimension spirituelle à l’homme.


Sensibilité – esthétique = sens (5)
Asthéno = je ressens (anesthésié = ne plus ressentir) 
Emotion = Moto = mouvement intérieur profond et souvent ascendant (ça me remue, et ça me transporte).
Le jugement de valeur est subjectif par le fait que c’est moi qui perçois, par mes sens. Il peut y avoir une non reconnaissance esthétique par d’autres. Mais ainsi que le précise Kant : « Est Beau non pas ce qui plaît à tout le monde, mais ce qui mériterait de plaire à tous ».


Les œuvres artistiques échappent à l’usure du temps parce qu’elles sont « symboliques ». Hannah Arendt explique que les œuvres « sont la permanence et la consistance du monde humain ». ( Crise de la culture)
Cependant la distinction entre production et création, entre artisan et artiste n’a pas toujours existé. Elle a commencé au 16ème siècle et a pris un tour juridique au 18ème siècle.
L’artisan ne vise pas la beauté pour elle-même, l’artiste applique des règles déjà établies mais la distinction est fragile : l’artiste travaille aussi les conventions et l’artisan peut innover.
Y’a-t-il une distinction entre les deux ?
Kant reprend l’idée socratique d’inspiration. Il écrit : « les beaux-arts sont les arts du génie »

« Génie » = genius = propre à chacun, particulier ; Donc original
Inventé en même temps que la signature. Ils signaient une œuvre qui leur était propre.
Le génie est pour Kant une disposition innée de l’esprit : « le don naturel qui donne les règles à l’art ». Pour lui, l’artiste est donc un créateur original qui ne sait pas vraiment comment il produit son œuvre, alors que l’artisan est un exécutant. (Critique de la faculté de juger). Mais pour Nietzsche cette « explication par le génie n’explique ni les motifs ni les mécanismes de l’invention et nous excuse en quelque sorte de n’être pas créateur nous-même en nous dispensant du travail astreignant que réclame l’art, dont parle Baudelaire.
Cette question n’est pas tranchée ; nous devons à présent nous interroger sur l’idéal poursuivi par l’œuvre d’art.

Le plaisir esthétique que nous procure la beauté est produit par la forme de ce qui nous affecte ; le sentiment du beau est suscité par la forme de ce que nous contemplons non par son utilité. Kant écrit que ce qui est beau « n’est pas ce qui nous est agréable sensuellement ; est beau ce qui plaît universellement sans concept ». Le caractère désintéressé du plaisir suscité en nous par le beau sera le signe propre de l’œuvre d’art.
Selon Hegel, dans l’Esthétique, l’art vise à satisfaire l’esprit dans ce qu’il a de rationnel, abstrait est donc d’universel en laissant intact l’objet représenté alors que le désir vise à satisfaire nos sens en consommant l’objet réel. Le plaisir esthétique est indépendant du désir envers ce qu’il présenterait. Il est « l’Esprit se prenant pour objet ». Le Beau est donc universel : il n’est pas ce qui plaît à tous mais ce qui mériterait donc de plaire à tous les hommes, en tout temps et en tout lieu. Cette idéalisation reprend la conception platonicienne du beau qui est une idée suprasensible, c’est-à-dire : dont on s’approche en s’éloignant de la réalité sensible dont elle n’est qu’un reflet.


Au 19ème siècle, cette idéalisation a trouvé sa forme radicale dans l’Art pour l’Art, c’est-à- dire : loin de toutes utilités.
Théophile Gautier, préface à Mademoiselle de Maupin.
Cette idéalisation s’est tout de suite trouvée contestée par le Romantisme dont l’utilité est l’expression ordonnée du « Moi » ; mais aussi, elle a été contestée par l’environnement technique issu de la Révolution industrielle dont certains artistes se sont plus à vanter les beautés et les innovations bouleversantes.
Une grande partie du 19ème siècle a continué dans cette voie en se mettant au service de productions utilitaires telles que la mode, le mobilier, l’industrie automobile. Cet intérêt pour l’objet technique s’est trouvé artistiquement employé par Marcel Duchamp, concepteur de « Fontain » et inventeur du « Ready Made ». Dada va regarder autrement les inventions techniques d’autant que dans le même temps se déroulait la première guerre mondiale : pour la première fois au monde la technique permettait de détruire de façon considérable.
Le design s’est surtout développé après la deuxième guerre mondiale, pour accompagner le développement technique et son extension à « la société de consommation » (Jean Baudrillard) . Son objectif est de dessiner des formes et de les embellir.
Kant avait prévenu : il y a la « beauté libre » et la « beauté adhérente ».
En privilégiant la beauté adhérente du fonctionnel par exemple, la beauté de l’objet technique et jusqu’à la production en série  d’œuvres, Walter Benjamin se demande si l’art n’a pas perdu son identité.


En fait, depuis Gutenberg, le rapport direct entre un manuscrit original et son public a disparu. Le mouvement n’a fait que se poursuivre avec la photographie, le disque, la radio, le livre d’art, la télévision (le 8ème art), le cinéma (le 7ème art), l’informatique.
Walter Benjamin estime que cette reproductibilité fait perdre à l’œuvre d’art son « aura »  quasi sacrée. A sa place se développent des formes de consommation culturelles de masse. Elle perd son caractère religieux au profit d’une appropriation par le peuple et de fait, elle doit tenir compte de la demande de divertissement du grand nombre et donc répondre à des impératifs commerciaux du système néolibéral. 
L’art s’est mis au service de la production de masse et de la technique et, dans le même temps, celle-ci se soucie davantage de la forme et de la beauté.
La conception de l’art est donc remise en cause. De nombreux artistes contemporains délaissant le service  d’un beau idéal, proposent de faire jouer à l’artiste un rôle « conceptuel » : à l’instar de Marcel Duchamp qui en 1917 a intitulé un urinoir « Fountain » : il s’agit de débaptiser l’objet technique, de faire disparaître son utilité technique et d’adopter à son égard un nouveau point de vue. Duchamp affirme que c’est moins l’artiste que le spectateur qui fait l’œuvre. Suite à Hegel qui pensait que l’art est mort  parce qu’il ne produit plus de sens par lui-même, certains philosophes modernes évoquent la fin de l’art et estiment que ce sont moins les propriétés propres à une œuvre d’art qui en font une œuvre d’art, que le regard que la société porte sur elle. La question reste ouverte et beaucoup de gens sont perplexes devant les œuvres aujourd’hui.



Les relations entre l’art et la technique ont été au cours de l’Histoire très complexes et le demeurent. Intimement liés, ils se sont séparés jusqu’à l’idéalisation de l’un au mépris de l’autre. Mais l’envahissement technique a fini par pousser l’art à se redéfinir et même à se dissoudre dans la technique.
Cette histoire a au moins le mérite d’en finir avec les schémas tout faits et les idées préconçues, et de nous inviter à renouveler constamment notre vision des mondes naturel et artificiel.   

mardi 25 janvier 2011

Trames de cours Mànaa

LA CONDITION HUMAINE
  La conscience, l’inconscient et le sujet
Introduction
Seul le sujet est conscient. Il est auteur de ses actes. Unique et distinct d’autrui, il se conçoit comme une identité singulière. Un tel sujet existe-t-il ? Depuis l’invention de l’Inconscient-au moins !-, la question se pose. Je prétends me connaître –qu’en est-il vraiment ? Suis-je réellement responsable de mes actes ? Et l’identité, c’est quoi au juste ?

Développement
I.                    La connaissance de soi.
Que puis-je connaître de moi de manière certaine ?
Ai-je seulement la capacité de voir clair en moi ?
Autrement dit : me connaître, jusqu’où ?
Peut-être ne suis-je pas le mieux placé pour m’appréhender et me connaître.
II.                  La responsabilité.
Les conditions d’une pleine et entière responsabilité.
La conscience en est-elle la condition nécessaire et suffisante ?
La question de Hannah Arendt. La responsabilité individuelle dans une action collective.
III.                L’identité.
Moi et mes rêves –le texte de Platon.
Selon René Girard, j’emprunte mon désir d’être à autrui. Mimétisme et aliénation.
L’identité selon Freud… Qui suis-je alors que « le moi n’est pas maître dans sa propre maison » ?

Conclusion
L’idée kantienne du sujet conscient de lui, maître et auteur de ses actes, est remise en cause par l’ invention  de l’Inconscient et par la théorie mimétique. Devenir sujet requiert un effort constant de lucidité et de positionnement moral sur ses actes.



La Technique, l’Art et le Beau
Introduction
L’art et la technique produisent un monde artificiel ; or, dans l’Antiquité, on ne distinguait pas les œuvres des ouvrages. Cependant, on peut dire que la technique consiste dans l’ensemble des moyens pour atteindre un résultat qui n’est pas dans la nature, et l’art produit des œuvres pour leur forme. Ainsi aurons-nous à nous interroger sur l’opposition de l’art et de la technique, sur celle du beau et de l’utile. Enfin,  nous nous demanderons si la technique n’a pas aujourd’hui triomphé de l’art.

Développement
I.                    L’opposition art-technique
En quoi consiste cette opposition et depuis quand existe-t-elle ?
Relations entre la maîtrise technique et la beauté de l’art.
L’artiste et l’artisan. Apports de la Révolution française.
II.                  L’opposition beau-utile
Le Beau comme plaisir désintéressé. Kant.
Le Laid, en grec, signifie : ce qui est  dépourvu de formes.
La possible beauté propre à l’objet technique ; la Révolution industrielle et son évolution vers le Design.
III.                Mort de l’art et triomphe de la technique
Le texte de Hegel (comme rappel)
La reproductibilité de l’œuvre d’art et sa transformation en objet de consommation –le fameux texte de W. Benjamin.
L’œuvre d’art est-elle  désormais supplantée par l’objet technique ? La question du Marché de l’Art.

Conclusion
Le rôle et la nature de l’art varient en fonction de l’époque et du lieu, et de ce que les civilisations lui demandent. La nôtre étant technique, menace-t-elle l’Art ? Etrange question, en vérité


LE SAVOIR
  La raison et le sensible
Introduction
Comme tout être animé, l’homme est doué de sensibilité qui est, de fait, la première source de toutes nos connaissances. Mais à la différence des animaux, l’homme est aussi doué de raison qui permet l’ouverture vers l’abstrait et l’universel. Grâce à la dualité de ces sources de connaissance, l’homme peut élaborer des savoirs. Cependant, de nombreuses questions se posent et qui portent sur l’opposition raison-expérience sensible, sur les réalités saisies par les sensations. Nous conclurons sur les parts respectives de la raison et de la sensibilité dans la connaissance.

Développement
I.                    Opposition raison-expérience sensible
La sensibilité comme condition de la connaissance.
Les faiblesse des sensations et les risques d’illusions.
D’où la question cruciale qui se pose : comment une connaissance correcte peut-elle s’établir sur la seule expérience sensible ?
II.                  Sensations et réalités
Part de la sensation dans une réalité objective
La démonstration de l’existence du monde matériel par la raison
Difficulté : la raison peut-elle réfuter le solipsisme ?
III.                Parts respectives de la raison et de la sensibilité dans la connaissance
L’Innéisme et le Rationalisme. Platon et Descartes – les Idées et les semences de vérité.
Les empiristes anglais : Berkeley, Hume, Locke – expérience et principes de la raison.
Le Criticisme kantien comme synthèse.

Conclusion
Il est bien des manières d’associer la raison et l’expérience sensible ; et sans doute est-il nécessaire de les associer pour parvenir à une connaissance du réel. Les sciences, aujourd’hui, ne procèdent pas autrement , elles allient sans cesse observations, hypothèses, théories et expérimentations : c’est à ces conditions qu’une connaissance est possible.


Le mythe, la science et la philosophie

Introduction
Les questions que l’homme se pose sur l’origine du monde et sa destinée, sur lui-même en tant qu’être social et individu, trouvent des formes de réponses dans la mythologie, la science et la philosophie. La première se présente comme un récit communautaire véridique et digne de foi, la seconde comme un discours logiquement argumenté, et la troisième propose des interprétations globales et rationnelles . Ces dernières, récemment apparues dans l’histoire, ruinent-elles le mythe ? Peuvent-elle seulement s’en dispenser ? Ou bien ces trois formes de réponses doivent-elles coexister ?

Développement
I.                    Science et philosophie contre le mythe
Distinctions entre mythe, science et philosophie.
La ruine de la mythologie par la philosophie.
Pertinence philosophique du mythe –les occurrences mythologiques dans l’œuvre de Platon ; Lévi-Strauss et René Girard.
II.                  Science et philosophie sans mythe
Fonctions du mythe au service de la raison.
Hiérarchies à établir entre mythe, science et philosophie.
III.                Coexistence
Métamorphoses du mythe –et cadres de nos « visions du monde ».
« La mauvaise conscience » de la science serait-elle la philosophie ?
Rapports entre mythes et sciences.

Conclusion
Il est vain d’opposer de manière absolue ces trois  manières de répondre aux interrogations fondamentales de l’homme. Placée sous le contrôle –plus ou moins bienveillant- des deux autres, chacune contribue sans doute à l’équilibre de notre pensée complexe parce que, depuis  Hegel et Benjamin, il n’y a jamais eu autant de productions artistiques de par le monde.


L’AGIR
  La morale, le droit et la politique
Introduction
Pour vivre en société, les hommes se dotent de différents moyens qui leur sont nécessaires pour assurer leur existence et leur survie au sein de cette même société. Il s’agit de la morale, du droit et de la politique. La première est relative à la distinction entre le bien et le mal ; la seconde distingue ce qui est autorisé et interdit et établit des sanctions ; la dernière se propose d’organiser et de diriger la société. Si ces domaines sont aujourd’hui différenciés, ils ne l’ont pas été dans le passé. Leur confusion comporte des dangers mais leur séparation trop nette pose bien des questions. Le droit peut-il ignorer les règles morales ? La politique doit-elle se conformer au droit ? La morale peut-elle s’ériger en juge de la politique ?
Développement
I.                    Le droit et la morale
Distinctions.
Relativité de l’idée de justice
Universalité des lois morales au-dessus des lois humaines –le cas Antigone.
II.                  La politique et le droit
La force au service du droit. Pascal.
Impératifs politiques et désobéissance au droit.
Vers un règne mondial du droit. Le progrès selon Kant.
III.                La morale et la politique
Ethique individuelle, éthique collective.
La fin et les moyens. Le Prince de Machiavel –et l’interprétation de Rousseau.
L’ordre moral ou la politique contre le mal.

Conclusion
Les trois domaines de l’activité sociale humaine ne doivent être ni confondus ni séparés. Nous avons besoin, pour assurer notre existence commune, de la morale, du droit et de la politique. Sans ces guides, il ne saurait y avoir de communauté viable. Les questions de leur mutuelle nécessité se pose, avec plus d’acuité peut-être, à l’heure de la globalisation des échanges.


Le devoir et le bonheur

Introduction
Le devoir, en grec, se dit déon, et ce mot compose le terme de déontologie. C’est assez dire que nous sommes ici dans l’éthique –laquelle s’intéresse aussi bien aux règles de comportements tant individuels que collectifs. Mais ne dois-je m’intéresser qu’au respect de la personne ou me préoccuper du plus grand nombre? Les deux sont-ils compatibles ou contraires ? Le bonheur, qui consiste en un état stable de contentement, est l’objet majeur de la réflexion des penseurs grecs anciens. Quelles relations entretiennent bonheur et devoir ? Etre heureux sans être vertueux, qu’est-ce à dire ? Quels sont les principes de l’obligation morale ? Ceux-ci ne sont-ils pas inapplicables ?

Développement
I.                    Bonheur et vertu
Le bonheur comme aboutissement. Les Grecs.
La vertu comme condition sine qua non du bonheur.
L’hédonisme peut-il fonder une morale ?
II.                  Principes du devoir
Fonction de l’obligation morale.
S’assurer du bonheur ou le vouloir, est-ce nécessairement moral ?
Viser à la fois le bonheur et le devoir. L’Utilitarisme de Stuart Mill.
III.                Le principe moral
Les principes du devoir relativement aux situations concrètes.
Responsabilité individuelle et responsabilité collective.

Conclusion
Serions-nous encore protégés de la violence si les impératifs moraux étaient laissés à l’évaluation de chacun? Serions-nous respectables à nos yeux si nous acceptions d’assurer notre réussite individuelle grâce à l’injustice commise contre un concurrent ? Une vie humaine sans devoirs indiscutables ne serait-elle pas sans valeur ?





Fiches Philo Design de Mode

1- Appartenance et différenciation


L'appartenance, voilà bien un mot qui caractérise chaque individu de cette planète. Elle désigne le fait d'appartenir à une catégorie, un groupe. Or, qu'il s'agisse d'appartenance ethnique, religieuse ou sociale, nous faisons tous partie de groupes prédéfinis par notre environnement et le milieu dans lequel nous évoluons. L’appartenance est une aspiration essentielle de l’humain. Elle lui procure un effet de reconnaissance et constitue un élément de son identité. Elle est le signe d’un lien humain et d’une place parmi nos semblables. Cette appartenance induit donc une ressemblance. Ainsi, chaque groupe, communauté ou ethnie se différencie de son voisin, ce qui procure au monde la diversité des cultures.
Mais au-delà de son besoin d'appartenance, l'homme aspire également à une identité individuelle, une personnalité qui lui serait propre. Se pose alors la question suivante : si l'on s'associe à un ensemble par le biais d'une ressemblance, comment se distinguer à l'intérieur de son propre groupe?
En effet, nos us et coutumes sont quasi identiques, nous évoluons au sein d'une même société et de mêmes institutions, nous obéissons aux mêmes lois, nous partageons souvent le même langage et la même religion. Il faut alors se forger sa propre personnalité et l'une des façons les plus évidentes pour la mettre en avant est l'apparence et l'habillement.
Le vêtement conjugué avec nos caractéristiques physiques est un des éléments les plus évidents de la différenciation. Chacun parvient alors par le simple geste de l'habillement à se créer une identité physique unique. La tenue vestimentaire devient le reflet de la personne et donc de l'identité. Il est alors évident que lorsque nous nous habillons nous tentons de véhiculer un message, de donner une image de nous-même. Le tailleur, par exemple, connotera le pouvoir. Ce message pourra ainsi varier, de façon contrôlé ou non, en fonction des vêtements que nous portons et de l'occasion pour laquelle on les porte. D'un point de vue social, une forme de hiérarchie se met en place en fonction de notre statut. Un ministre s'habillera en costume, un professeur souvent de manière plus décontractée et un ouvrier en bleu de travail. La tenue vestimentaire tend alors à informer autrui à la fois de ma personnalité, de mon statut social ou de ma fonction. Elle donne une image qui me définit. Si l'image que je reflète à travers mes vêtements a un impact sur le monde qui m'entoure alors qu'en est – il si je décide de mettre moi-même une image explicite sur mon habit ?
Mon vêtement véhiculerait ainsi le message que je souhaite, et pourrait sortir des codes préétablis de la société actuelle.
Si je décide d'intégrer une image à un vêtement, c'est que j'ai fait le choix d'une image en particulier plutôt qu'une autre et donc que je cherche à mettre en avant une chose qui me ressemble, qui me représente ou qui me plait.
L'image que je mets sur mon vêtement établirait un lien entre ce que je suis et ce que je parais, elle exprimerait mes opinions, mon état d'esprit. Si l'on se penche sur la définition exact de l'image, le latin « Imago » est «la représentation visuelle, voire mentale de quelque chose, d'un objet, d'un être vivant, d'un concept . Elle peut entretenir un rapport de ressemblance directe avec son modèle ou au contraire y être liée par un rapport plus symbolique».
Ainsi, l'image que je choisis de porter sur un vêtement serait en quelque sorte une image de moi-même car elle renverrait directement à quelque chose qui fait partie de mon intériorité (humeurs, réactions affectives, ressenti, etc...). Je conserve toutefois la liberté de choisir une image fausse, en contradiction avec ce que je suis ou avec ma fonction. Je peux donc par le biais de l'image être dans le déguisement plutôt que dans l'exhibition, rester dans le paraître et non dans l'être. Car l'image est un simulacre (pour reprendre le mot de Platon), une imitation, et n'est parfois qu'un mensonge .


2 - CHAMAN, l'homme animal.

            Le principal point d'ancrage du chamanisme, et le plus solide, demeure la Sibérie, où il est qualifié d'authentique, de "classique". La taïga est la terre d'origine du mot "chaman", il désigne "le serviteur de la religion"; or l'une de ses fonctions premières est de sacrifier des animaux. Or, si les chamans sacrifient des animaux, il est étonnant de voir qu'ils implorent ensuite leur pardon. Quels rapports lient le chaman aux animaux ? Le chamanisme, comme forme d'animisme, considère l'animal égal à l'homme; ainsi la chasse de ces animaux est conçue comme un échange avec la Surnature; et le chaman, pour entretenir ces échanges, doit lui-même devenir animal.
            Les sociétés "archaïques" seraient arrivées à l'idée d'un principe différent du corps, c'est-à-dire à l'idée de l'âme, à la suite de divers phénomènes. Quand ce principe abandonne provisoirement le corps, l'homme s'endort, l'âme vagabonde et a ses propres expériences, les rêves. Lorsque l'âme se sépare du corps, c'est la mort. L'extase et la maladie sont un abandon temporaire du corps par l'âme. Et, puisqu'on rêve de personnes décédées, l'âme survit à la mort. L'âme est cette entité spirituelle de l'homme qui tire directement son origine de la divinité.
            Dans la conception chamanique, les os de l'homme sont faits avec l'arbre familial, les muscles avec la terre, le souffle est donné par le vent. L'âme, l'énergie vitale, est donnée par les dieux. Par ces éléments, l'homme est lié à la nature et au cosmos, il forme le tout, une unité avec l'espace dans son ensemble. L'existence autonome de l'âme conduit à l'idée des esprits indépendants, qui animent les êtres naturels, végétaux ou animaliers. Ainsi, l'homme appartient à un tout dont font partie les esprits qui peuplent cette Nature. Animal vient d'anima, âme en grec. L'animal, puisqu'il est habité par un esprit de la même manière que l'homme a une âme, est l'égal de l'homme. La vie des humains dépend de la bienveillance de ces esprits. Il est donc nécéssaire d'avoir un médiateur dans les relations entre les personnes qui habitent le monde supérieur et le monde inférieur, c'est le rôle du chaman. C'est à partir d'un fond animiste que les chamans ont donné forme à l'idée d'un "commerce professionnel" avec les esprits.
            Le chamanisme est étroitement lié à la chasse puisque sa fonction première est de favoriser l'obtention du gibier. Ce gibier est animé par des esprits avec qui le chaman entretient des relations pour avoir accès aux êtres naturels qu'ils animent. Or, cette prise est fondée sur une relation d'échange et doit être compensée. De même que les humains mangent la viande des animaux, les esprits des espèces sauvages sont censés dévorer la chair et boire le sang des humains; le renouvellement des générations, par la réincarnation, est donc la condition de la réapparition du gibier. Cet échange est régi par une véritable sympathie avec la Surnature. Le chaman prend une épouse dans le monde nourricier: la fille de l'esprit donneur de gibier qui l'a élu pour mari. Elle agit en protecteur du chaman, l'aide à trouver son chemin et dirige sa destinée, accueille les sacrifices et écoute les prières. Elle lui obtient le gibier mais aussi des esprits auxiliaires animaliers qui lui servent de guides dans la Surnature. Les esprits sont donneurs de mort tout autant que de vie. S'ils jettent des maléfices aux hommes, c'est lorsque ceux-ci ne respectent pas le "contrat". C'est alors au chaman d'aller "négocier" le rétablissement du malade. Un rituel commence par le sacrifice d'un animal aux esprits pour que ceux-ci dévorent sa chair plutôt que celle des hommes. En échange, c'est lui-même qui se rend, offrant finalement à la Surnature sa propre force de vie: à la fin d'un rituel, le chaman tombe comme mort, accomplissant l'échange entre humanité et Surnature. Il devient à son tour le gibier.
             Le chaman est marié à la fille de l'esprit donneur de gibier. Comme elle reste animale dans sa relation conjugale avec le chaman, c'est à lui de la rejoindre lors des rituels. Pour voyager dans le monde de la Surnature, le chaman va partir en transe, son âme va s'extraire de son corps pour voguer à travers les différentes strates du monde. Ce voyage céleste par l'esprit, cette capacité à se mettre volontairement en transe passe par la perception de la musique magique, du bruit ensorcelant des tambours, des chants enivrants et par des danses exténuantes. Les chamans guérissent par l'art : les mythes et les chants. Durant son rituel, le chaman appelle les esprits courroucés, le sacrifice d'un animal est donc nécéssaire pour que ceux-ci s'en nourissent plutôt que de s'en prendre aux personnes assistant au rituel. Le tambour du chaman, où sont représentés ses esprits auxiliaires, le protège. Avec son costume - manteau en peau de cervidé, coiffe en couronne à ramure - et par l'apparence ensauvagée de son comportement durant le rituel, le chaman devient lui-même animal et est donc prêt à aller "négocier" avec les esprits, d'égal à égal.



3 - PUNK & ROCK

=Inventer contre=

  Le punk rock est un genre musical dérivé du rock, apparu au milieu des années 1970, associé au mouvement punk de cette même époque.
Il se développe surtout entre 1974 et 1976 aux usa, u.K. et en Australie. Des groupes comme the Ramones, the Sex Pistols, et The Clash sont  les pionniers d'un nouveau mouvement musical.
La première vague punk rock a eu pour but d'être agressivement moderne[]. Lorsque la révolution punk rock a commencé en U.K., elle est censée être une « Année Zéro » à la fois musicale et culturelle. On est alors dans le besoin de réinventer le monde et de se réinventer soi-même avec l’optique de détruire pour mieux reconstruire.
  À l'origine, les punks, qui baignent dans la fin des illusions hippies des années 1970, sont souvent des individus créatifs qui redoublent d'énergie devant la vision très négative du monde et de l'avenir, l'ennui et l'asphyxie qui se présentent à la jeunesse. Alors que le Disco est dominant, ils vivent l'amusement frivole comme une tromperie ringarde et se tournent vers une autre musique brute et rebelle, expression du désœuvrement moral de la jeunesse. Beaucoup plongent dans la drogue, le refus de tout, la musique non-conventionnelle, etc. C'est aussi par esprit de révolte contre un système qu’ils jugent nihiliste rejoignant Nietzsche pour qui la négation de l'être est une manière divine de penser, en ce sens qu'elle est un rejet définitif de tout idéalisme et de ses conséquences. Les Sex Pistols lancèrent le « No Future », appelant à la révolte contre l'ordre établi et la morale bourgeoise.
Il s’agit pour eux d’inventer contre.
  La philosophie du punk est d’abord l’urgence, le cri, la singularité et l’énergie voire l’émeute. L’invention passe par la destruction et contre les politiques des années 70. Le punk n'est en principe pas égocentré : il ne s'intéresse pas à la question de savoir s'il est punk ou pas, mais se concentre sur son action. L'idée est que « punk » ne soit pas une simple étiquette mais bel et bien un mouvement actif ; il s’agit d'agir pour des causes qui touchent à cœur ceux qui participent au mouvement. Ce discours, souvent à l'origine extrêmement sombre et pour certains tourné vers l'autodestruction, cohabite avec l'ambiance fun et destroy des concerts et une certaine insouciance. Une nouvelle forme de révolte prend la place : beaucoup de groupes punk se politisent et abandonnent la violence des débuts ; on se bat pour avoir un avenir, on lutte pour le droit des femmes, contre le racisme, etc. Il ne s'agit plus de se shooter pour se couper d'un monde dégueulasse, on agit pour l'améliorer. Au désespoir des premiers temps a succédé l'espoir d'un autre monde. C'est notamment ce que portent les Bérurier Noir, dénonçant l'état du monde, l'égoïsme des hommes, et militant en musique pour un monde plus noble, plus libre, d'où seraient éradiqués racisme, sexisme, pollution, guerres, etc.: un monde idéaliste vidé de toute ses peurs, de l’appréhension du futur chaotique.


4 - MUTATION(S)

   La faculté d’adaptation de l’Homme est sa plus grande force. Si pour certaines espèces elle assure la survie (survie passive), pour la race humaine elle prend une toute autre dimension. L’Homme sait tirer le meilleur profit de tout ce qui l’entoure afin d’atteindre les buts qu’il s’est fixés. Notre instinct animal de domination et de pouvoir est renforcé par notre capacité à créer nos propres moyens. Ces différentes techniques se sont illustrées à travers les cultures et les époques.
Cette particularité du genre humain est intéressante car elle est constante et amène à comprendre le fonctionnement de la société actuelle et les problématiques qui en découlent, à savoir, les luttes de pouvoir, la société de performance, la prépondérance de la génétique…
Deux aspects sont particulièrement éloquents. D’un côté notre instinct qui a une prédominance  guerrière et de l’autre une volonté de compenser nos faiblesses physiques. Le Guerrier par exemple, se transforme pour produire un effet, l’effet de la peur qu’il fait passer à travers l’imitation du comportement ou des caractéristiques animales. Les capacités polymorphiques de l’être humain le place dans une position d’indifférenciation, ni tout à fait homme ni réellement animal. Impressionner,  se  protéger, sont autant de préoccupations qui poussent l’homme à changer d’apparence.
   Dans les luttes de pouvoir, l’apparence joue un rôle crucial et détermine notre façon de nous habiller. Pour certaines tribus, il s’agissait de porter la peau de l’animal que l’on a tué pour imposer le respect ; pour les samouraïs, le masque de combat représente un visage mi- humain, mi- animal destiné à impressionner l’ennemi ; et pour les working-woman des années 80, il s’agissait d’exprimer son statut de femme de pouvoir en accentuant sa carrure à renfort d’épaulettes.
 L’homme cherche à s’identifier car il fonctionne par « évocations ». L’idéalisation du corps est constamment présente dans ses représentations à travers l’Histoire ; c’est une caractéristique de l’Homme, de l’Egypte Antique à nos jours : il cherche à se représenter ou à ressembler à son idéal, le plus souvent divin. L’idée du beau se retrouve tant dans les statues grecques que dans les modifications chirurgicales actuelles ; du sensible à la matière, on passe à l’intelligible, pour reprendre le vocabulaire de Platon. La transformation volontaire nous fait passer du naturel au culturel en amenant les notions de déification, d’idéalisation, d’esthétisme, d’appartenance ou encore de  reconnaissance. Chez l’être humain, la mutation est une liberté qui traduit un choix, le choix de se détacher de sa nature profonde, des choses qui le contraignent. Même si cela implique de s’imposer de nouvelles contraintes, telles que les corsets ou les modifications physiques (implants) car elles contrarient l’état naturel du corps. Mais être humain, n’est-ce pas nécessairement se modifier ?
   L’homme, conscient de ses faiblesses, cherche constamment à améliorer sa condition en tirant de lui-même ses propres outils. Dans la créature de Frankenstein de Mary Shelley, on retrouve le mythe de Prométhée venu apporter le feu aux hommes pour compenser leur faiblesse physique, évoqué dans le Protagoras. C'est ce don lui-même, conçu a priori comme une bénédiction, qui est a posteriori la cause de leur chute. Dans le même ordre d’idées, la médecine moderne repose de plus en plus sur l’intégration de dispositifs mécaniques et électroniques dans le corps humain, ce qui n’est pas sans susciter des inquiétudes. L’Art Post-humain qui dénonce un adieu à la forme générique de l’humain et le danger du renoncement à sa propre figure rejoint cette idée et nous met en garde sur la perte de contrôle telle qu’elle est initiée déjà dans le mythe de Prométhée.